Nous avons eu l'opportunité de participer au premier festival de live shopping en France, organisé par les agences Liveup et Adopterz. Sur place, nous avons échangé avec l'un des organisateurs ainsi qu'avec une entreprise participante.
Bien que le live shopping soit déjà très répandu en Asie, ce format reste encore peu exploité en France, particulièrement à cette envergure. Ayant une longue expérience dans le commerce physique et maintenant des liens étroits avec détaillants et entreprises, nous avons observé cet événement avec un mélange de curiosité et d'émerveillement face à ce qui pourrait représenter le commerce de demain.
Retour et analyse de notre expérience et les signaux faibles que nous avons perçus.
Rendez-vous en terre inconnue dans la fabrique de live.

Si vous n’êtes pas encore familier avec le live shopping, le principe est pourtant assez simple. Il s’agit de vendre des produits en direct, via une vidéo diffusée en temps réel, pendant laquelle une animatrice ou un animateur présente les articles, répond aux questions et interagit avec l’audience. Les spectateurs regardent, échangent, et peuvent acheter immédiatement, sans quitter le live.
On pourrait y voir une version moderne du télé-achat, mais la comparaison s’arrête assez vite. Ce qui change vraiment aujourd’hui, c’est l’interaction permanente, l’instantanéité de l’achat et l’intégration dans des usages déjà bien ancrés sur les réseaux sociaux. Le live shopping s’inscrit dans les codes du contenu plus que dans ceux de la publicité.
Pendant longtemps, en France, ce format est resté marginal. Il existait déjà des lives sur Instagram, Facebook ou YouTube, mais sans véritable parcours d’achat fluide. On parlait de live shopping, mais la conversion restait souvent déportée vers un site externe, avec beaucoup de frictions.
Aujourd’hui, il existe plusieurs manières concrètes de faire du live shopping :
Les plateformes sociales : Instagram, TikTok, Facebook ou YouTube permettent de lancer simplement un live depuis un smartphone, avec l’avantage évident de s’appuyer sur une audience déjà présente. C’est la porte d’entrée la plus accessible pour tester le format.
Les solutions technologiques dédiées : comme Skeepers, Livescale, Bambuser, Caast TV ou CommentSold permettent aux marques d’héberger le live directement sur leur site ou leur application. Ici, le contrôle de l’expérience est plus complet, mais l’audience est à construire.
Les marketplaces orientées live shopping : comme Amazon Live, Whatnot ou Popshop Live, où le direct est au cœur de l’expérience d’achat. Ces plateformes fonctionnent comme des places de marché du live, avec déjà du trafic, des vendeurs et des créateurs.
Les outils de streaming : comme OBS ou StreamYard viennent renforcer la qualité de production, sans être des solutions de vente à proprement parler.
Pendant des années, tous ces dispositifs ont coexisté sans véritable standard. Le live shopping existait, mais il restait éclaté, parfois expérimental…
Côté marques françaises, le questionnement reste très présent. Le canal intrigue autant qu’il attire. Il ne s’est pas encore imposé comme un passage obligé pour tous.

Depuis avril 2025, un changement d’échelle est perceptible en France avec l’arrivée de TikTok Shop. La plateforme a triplé son nombre de vendeurs actifs en France passant ainsi de 5 966 à près de 16 500.
À Tech for Retail, Arnaud Cabanis (Regional General Manager France & Southern Europe chez TikTok) rappelait récemment quelques ordres de grandeur :
Environ 860 sessions de live chaque jour en France.
16 % du chiffre d’affaires de TikTok Shop provient directement des lives.
Le chiffre d’affaires global de la plateforme a triplé depuis avril.
Les secteurs les plus dynamiques sont la beauté, la mode, la grande consommation, la maison et la décoration.
Ces chiffres montrent à quel point le live est devenu un levier central dans le modèle de TikTok Shop. Reste que cette accélération repose sur un ensemble de mécanismes qu’il vaut la peine de regarder de plus près.
Un modèle pensé pour aller vite et générer du volume
Ce qui frappe d’abord, c’est la capacité de TikTok Shop à activer rapidement une mécanique de vente. L’intégration native avec Shopify permet déjà de synchroniser commandes et stocks, même si l’ensemble reste parfois rigide dans l’exécution. Surtout, l’affiliation joue un rôle déterminant. Certains créateurs parviennent à générer du volume en très peu de temps, parfois en quelques lives seulement. Le reach naturel de TikTok, porté par des usages massifs, fait le reste. À cela s’ajoute un écosystème de créateurs particulièrement dense, structuré par la Creator Marketplace, et une logique d’hyper-ciblage algorithmique qui permet de pousser efficacement une référence auprès des bonnes audiences.
Dans cette continuité, le déploiement de GMV Max marque un vrai tournant. Pour la première fois, une partie du pilotage de la performance est confiée directement à une IA. Elle gère automatiquement les enchères et le ciblage pour atteindre un objectif de rendement défini par la marque, notamment en ROAS. Si TikTok estime que cet objectif n’est pas atteignable, la plateforme peut arrêter de dépenser le budget et rendre la marque éligible à un crédit publicitaire. La promesse est claire, celle d’un système orienté en priorité vers la conversion et la rentabilité.
Une réalité opérationnelle encore heurtée
Sur le terrain, cette mécanique se heurte pourtant à plusieurs limites très concrètes. Le support TikTok France est souvent décrit comme sous-dimensionné, ce qui entraîne lenteurs, incompréhensions et parfois des situations bloquantes autour des comptes ou des documents. La documentation, jugée incomplète ou mal traduite, renforce la dépendance aux agences et aux groupes d’entraide. Les délais de versement, qui peuvent atteindre trente jours, pèsent directement sur la trésorerie des marques, d’autant que la commission est prélevée sur le montant TTC, livraison comprise. À cela s’ajoute une image encore fragile du canal, brouillée par une impression de saturation liée au dropshipping bas de gamme.
Un marché encore largement ouvert
Malgré ces frictions, le contexte reste favorable. Le marché français est toujours en phase d’équipement. Les acteurs qui s’y engagent tôt bénéficient d’une visibilité plus forte, dans un environnement où la concurrence est encore peu structurée. Il y a aujourd’hui une vraie fenêtre de tir pour les marques qui acceptent d’expérimenter, d’apprendre vite et de structurer leur approche.
Des fragilités qui pèsent sur la projection à moyen terme
Ce développement s’accompagne toutefois de fragilités qu’il serait risqué d’ignorer. Le risque de rejet des utilisateurs est bien réel si le fil devient trop agressif commercialement. Les incertitudes réglementaires, notamment autour de la TVA et de la localisation des stocks, restent en suspens dans plusieurs configurations. Le modèle repose fortement sur les créateurs, et sans contenu, il n’y a tout simplement pas de ventes. Enfin, la plateforme demeure techniquement jeune. Bugs, commandes annulées sans explication claire, process encore instables, tout cela alimente une forme de prudence. À plus long terme, le risque d’une homogénéisation des contenus, à mesure que les placements se multiplient, pose aussi la question de l’essoufflement des performances.
@adopterz Jour J - UN MOMENT HISTORIQUE POUR LE LIVE SHOPPING EN FRANCE. On nous l’a demandé. Les marques l’ont espéré. Les créateurs l’ont rêvé. Alors… on l’a fait. 🔥 En moins d’un mois, nous avons réussi l’impossible : imaginer, construire et lancer le tout premier Live Shopping Festival de France, en collaboration avec les équipes TikTok France et TikTok Shop. Pour la première fois, le TOP 100 des créateurs TikTok Shop sera réuni au même endroit, aux côtés de plus de 15 marques parmi les plus performantes sur la plateforme. Et pour donner vie à cette vision, Adopterz et @Live’Up Agency unissent leurs forces au cœur du Groupe Olyn, au sein de la Digital Power House à Paris. Un lieu symbolique, où l’innovation rencontre la création. - 12 heures de Live Shopping non-stop, le jour du hashtag#BlackFriday - 12 heures pour repousser les limites - 12 heures pour écrire une page de l’histoire du hashtag#SocialCommerce en France Plus de 50 liveuses, liveurs et modérateurs réunis, Des espaces pensés pour créer, filmer et performer, Des centaines d’échantillons mis à disposition pour inspirer les contenus de demain. Ce n’est pas un événement. C’est un tournant qui va redéfinir l’écosystème du Live Shopping français. Et ce n’est que le début … @GRANIONS @Magnifiscience @Mush n Go @morphea_bed @Maison Bagages @Mela’Aura @Novoma @Diame paris @AOLA BIJOUX @YOUARDA.C @In Haircare @Cosmeshop. @MISTER LUDO ♬ son original - Adopterz
Le Live Shopping Festival, organisé le 28 novembre 2025 par les agences Adopterz et Live Up avec le soutien de TikTok Shop, en est une bonne illustration de la phase d’expérimentation du live commerce en France.
Le choix du Black Friday n’est évidemment pas anodin. La période concentre déjà une forte intention d’achat, une pression promotionnelle maximale et une attention particulière des marques sur la performance. Installer un festival de live shopping à ce moment-là, c’était à la fois un test grandeur nature et une manière d’inscrire le live dans un temps fort du commerce, là où il est attendu au tournant.
Derrière l’événement, l’objectif était double :
Acculturer les marques au format du live shopping sur TikTok Shop.
Continuer à structurer un écosystème encore jeune, avec ses liveuses, ses modérateurs et ses agences spécialisées.
Ce festival s’est présenté comme une première en France. Organisé autour d’un format de douze heures de live continu, l’événement a réuni onze marques diffusant leurs sessions tout au long de la journée, accompagnées par les principaux créateurs TikTok Shop.
Côté chiffres, Tony Amato (Directeur d’Adopterz) donne une première idée de l’ampleur du dispositif :
128 000 € de GMV
4 millions d’impressions
353 000 spectateurs
plus de 100 créateurs impliqués
45 liveurs et liveuses formés
jusqu’à 30 liveuses et 30 modératrices mobilisées simultanément

Ces chiffres donnent un cadre. Pour comprendre ce qu’il se joue derrière ce festival, nous avons posé quelques questions à Tony :
🔸 Comment est né ce projet et quels acteurs sont derrière cette initiative ?
« Cet événement est né de la collaboration entre deux agences : Live Up, spécialisée dans le live et déjà récompensée à Paris, Londres, Miami et Barcelone, et Adopterz, experte de TikTok Shop. Ensemble, elles ont créé ce festival inédit avec le soutien officiel de TikTok Shop. »
🔸 Vous avez aussi souhaité structurer la reconnaissance autour de ces métiers. Que mettez-vous en place ?
« Nous avons également lancé le premier certificat officiel du live, qui sera remis aux marques participantes, ainsi que des trophées récompensant les créateurs et liveuses ayant tenu ce marathon de douze heures. »
🔸 Comment se déroule concrètement la journée et le suivi de la performance ?
« En direct, nous suivons les chiffres de ventes et la GMV de la journée. Chaque marque a débuté son live à 10 heures et termine à 22 heures. Les liveuses et modérateurs formés accompagnent les marques toute la journée : les premières animent les ventes, les seconds gèrent les produits épinglés, les réponses aux commentaires et les questions des spectateurs. »
Compléments alimentaires, cosmétique, literie, bagagerie, bijoux, bien-être ou encore soins capillaires. Le festival a volontairement mêlé les catégories pour observer comment le live se comporte selon les produits, les audiences et les mécaniques de vente.

Parmi ces marques, Diamé Paris a accepté de nous partager son retour d’expérience, avec une parole très concrète sur ce que le live change, et sur ce qu’il bouscule aussi dans l’organisation du quotidien.
@diameparis Le live ce soir est à 20h ❤️On prépare vos colis de Noël ✨✨✨✨✨✨✨ #skincareroutine #beauty ♬ All I Want For Christmas Is You - Mariah Carey
🔸 Pouvez-vous nous expliquer votre activité et ce qui vous a amenée au live shopping ?
« Je suis dans le secteur esthétique et cosmétique depuis 17 ans. Mes produits sont 100 % français, testés, et fabriqués en France, notamment des soins anti-rides. Je vends dans mon institut, mais je fais surtout du e-commerce. Le live shopping, c’est un vrai levier : c’est plus efficace et moins cher que la publicité classique. On est sur de l’achat impulsif, et c’est ce qui fonctionne le mieux. »
🔸 Comment se déroule concrètement un live et quelles sont les contraintes derrière ce format ?
« Pendant un live, la vendeuse lance une offre flash. De son côté, la modératrice, depuis son ordinateur, active la promotion, choisit la durée, et est diffusée directement sur la plateforme.
C’est du travail : sur TikTok, il faut assurer la livraison en 48 heures, sinon on est banni. Il faut donc une logistique solide et être bien accompagné. »
🔸 TikTok Shop est-il, selon vous, un bon point d’entrée pour une marque comme la vôtre ?
« Je viens du secteur de la cosmétique. J’ai créé ma marque, et je trouve que TikTok Shop est une bonne porte d’entrée pour se lancer, à condition d’avoir un site bien conçu et un joli compte Instagram. »
🔸 Comment vous êtes-vous organisée pour produire ces lives ?
« Il faut de l’énergie et être bien entouré. Mon associée travaille avec une agence ; nous avons été parmi les premiers à faire du live shopping. Il est aussi important de trouver de bonnes vendeuses, souvent des freelances. Elles peuvent travailler de chez elles. On leur fournit du matériel, lampe, trépied, kit complet, des fiches pratiques sur les produits et une formation pour apprendre à animer un live. »
🔸 Quel regard portez-vous aujourd’hui sur les performances et les limites du format ?
« À mon avis, il y a encore des choses à améliorer. L’algorithme de TikTok est parfois déroutant : un live peut faire 500 vues, un autre 500 000, certaines ventes montent à 2 000 €, d’autres tombent à zéro. Le frein principal reste la méfiance des consommateurs : pour beaucoup, TikTok est encore associé aux arnaques ou au dropshipping. »
1- Des lives à la croisée de la communication et de la vente
Ce qui ressort d’abord, c’est la manière dont le live shopping efface progressivement la frontière entre communication et commerce. Le live n’est plus seulement un outil de conversion. Il devient un espace d’incarnation de la marque, un moment où l’on raconte un produit, où on le montre en situation, où l’on crée une relation, tout en vendant. L’acte d’achat ne se fait plus après le contenu, il se fait dans le contenu.
2- La logistique, condition silencieuse de la performance
Dans cet environnement, la logistique n’est plus un simple sujet d’arrière-plan. Elle devient une condition visible du succès. Sur TikTok Shop, la rapidité et la fiabilité des livraisons ne sont pas seulement des critères de confort pour le client, elles conditionnent la continuité même de l’activité.
Le live peut créer l’envie en quelques minutes, parfois en quelques secondes, mais la promesse ne tient que si l’exécution suit. À cette exigence s’ajoute la volatilité algorithmique.
Le contenu, le timing, l’audience, tout se joue en temps réel. Le live est un levier puissant, mais intrinsèquement instable.
3- La crédibilité comme nouvel avantage concurrentiel
La crédibilité des marques “Made in France” agit comme un véritable levier différenciant dans un univers encore largement brouillé par l’image du dropshipping.
La méfiance des consommateurs est bien réelle, mais elle crée aussi un espace pour les marques capables de prouver leur sérieux, leur traçabilité et leur savoir-faire.
4- De la vente traditionnelle à la vente en direct
Déformation professionnelle, expérience terrain... Appelez ça comme vous voulez.
Aujourd'hui, le métier de vendeur souffre d'un manque de considération, et les boutiques peinent à recruter. Pourtant, une partie du succès commercial repose désormais sur les Liveuses !
Ces excellentes vendeuses/démonstratrices, qu'elles ou ils viennent de boutiques, de foires, qu'ils soient démonstrateurs ou autodidactes, se retrouvent maintenant au cœur du système, alors que ce métier était auparavant considéré comme une voie sans issue.
Leur profession se réinvente : ils peuvent l'exercer en complément d'activité ou en freelance, depuis leur domicile. Cette évolution remet en question leur métier traditionnel - entre commissions et rémunérations, les choses peuvent évoluer rapidement.
Nous y voyons un bouleversement des métiers, mais aussi un enjeu pour les boutiques qui doivent fidéliser leurs équipes et attirer de nouveaux talents. Cette évolution interroge la capacité des boutiques à recruter, fidéliser et attirer de nouveaux talents.
5- Du contenu à la conversion, un changement culturel plus profond
En toile de fond, se dessine un basculement plus culturel. Celui du passage progressif de la creator economy vers une économie de la conversion. La créativité seule ne suffit plus. Les plateformes, les marques et les agences attendent désormais des créateurs qu’ils transforment réellement leur audience.
Le tri se fait de plus en plus clairement entre ceux qui divertissent et ceux qui convertissent. Ce glissement n’est pas brutal, mais il est déjà bien engagé. Il redéfinit la valeur du contenu, la place des créateurs et la notion même de performance dans les écosystèmes sociaux.
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